Lorsque l’on parle des critères de réussite d’une campagne de publicité en ligne, le premier critère spontanément cité et évidement le taux de clic.Indiquant le nombre de personnes ayant cliqué sur la bannière (ou autre format) par rapport au nombre d’apparition de celle-ci, c’est un indicateur comportemental trouvant très vite ses limites.
En effet, celui-ci ne tient pas compte de toutes les autres interactions possibles entre l’individu et la publicité : une bannière peut être vue mais non cliquée, vue de manière inconsciente, pas vue du tout, ou encore généré une activité de non-clic (part encore faible des publicités en ligne). C’est le deuxième cas qui nous intéresse ici, c’est-à-dire quand un internaute mémorise de manière inconsciente une publicité.
Plus de la moitié de la population française est maintenant connectée à Internet et avec l’uniformisation des formats et des emplacements publicitaires sur les pages Web, on avance de plus en plus souvent que les internautes, devenant de plus en plus aguerris, apprennent à lire les pages en évitant les zones publicitaires ; c’est l’effet « banner blindness », mis en évidence par les méthodes d’eye tracking.
Que se passe-t-il lorsqu’un internaute est face à une page contenant une bannière à laquelle il ne fait pas attention et qu’il ne se souvient même pas avoir vue ?
Une étude a été menée par M. Arnaud Pêtre de l’Unité de Marketing de L’Université catholique de Louvain sur les traces inconscientes laissées par une bannière publicitaire et mesurées par un test implicite de mémoire. Tout le protocole expérimental est disponible dans le Revue Française du Marketing n°201.
L’efficacité et la mémorisation publicitaire sont aujourd’hui mesurées par des tests explicites de mémoire de type Day After Recall ou Starch visant à évaluer à posteriori des variables quantifiables (reconnaissance, agrément, attribution, notoriété, rappel). Les tests implicites, eux, ne nécessitent pas forcément un souvenir conscient, mais sont basés sur l’effet de facilitation (ou amorçage) de ce qui a été mémorisé inconsciemment. C’est la mesure de cette facilitation qui constitue le test implicite. Dans le cas d’une bannière, le test implicite va consister à la dégrader en plusieurs niveaux différents de dégradation jusqu’à le rendre quasi méconnaissable, et de voir à quelle niveau elle est en moyenne reconnu (ou attribuée à un marque, un secteur) par des internautes ayant vu la bannière inconsciemment un nombre différent de fois.
Les résultats permettent d’avancer que le test implicite d’identification est sensible à la pression publicitaire. Plus un sujet a été exposé à la bannière, plus il la reconnaît facilement alors qu’il ne se souvient pas l’avoir vue. En d’autres termes, même lorsque nous n’y faisons pas attention les publicités sont inconsciemment mémorisées par notre cerveau et nous reconnaissons le message et la marque d’autant plus facilement que nous avons été exposés au message.
L’auteur démontre donc "qu’une partie de l’exposition publicitaire est uniquement mémorisée en mémoire implicite et que l’efficacité d’une campagne mesurée par les seuls tests classiques de la mémoire est largement sous-estimée".
Tout ceci pour arriver à la conclusion suivante : la mesure de l’efficacité d’une campagne ne se limite donc pas, répétons-le une fois de plus au taux de clic.
PS: on peut cependant débattre sur l'aspect éthique de ces recherches, surtout quand il s'agit de publics jeunes, dans la mesure où l'on tend à diriger le comportement d'achat de manière inconsciente.
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