Les enfants sont beaucoup plus vulnérables que les adultes face à la publicité de manière générale. C'est encore plus le cas sur Internet en raison de l'absence de délimitations sur les pages entre le contenu et les publicités.
Chaque année, Internet touche une partie de la population de plus en plus grande, et parmi elle, les enfants. On peut considérer qu'à peu près 20% des 6-11 ans se connectent régulièrement à Internet, ce qui attire de plus en plus l'attention du marché de la communication en ligne. En effet, une étude menée aux USA a révélé que 52% des enfants âgés de 5 à 17 ans ont déjà demandé à leurs parents de leur acheter des produits qu'ils avaient vus en surfant sur Internet.
Dès lors, il va de soi de se poser la question de la relation qu'entretient l'enfant avec la publicité sur Internet, sous sa forme la plus courante et la plus attractive : la bannière. L'enfant est-il réellement conscient que le visuel en face de lui est une publicité? A quel âge l'enfant comprend-il ce qu'est une publicité?
Contrairement à la télévision où les spots publicitaires sont séparés des émissions par un jingle "PUB", les bannières, malgré l'uniformisation en cours des emplacements et occasionnellement la présence du mot "publicité", ne sont pas séparées du contenu du site. On désigne sous le terme "discrimination" le fait d'être conscient du caractère publicitaire d'un visuel; ainsi un enfant qui comprend bien que l'image est une publicité "discrimine" bien.
Il est également important de souligner une pratique répandue chez les publicitaires qui consiste à faire volontairement ressembler la publicité au contenu du site. Cette pratique porte un nom : le "host-selling". Ainsi, lorsqu'un enfant se trouve face à une bannière qui imite le contenu du site dans lequel il se trouve, il est beaucoup plus compliqué pour lui de se rendre compte de son caractère publicitaire.
Je livre ici les résultats d'une étude menée par Arnaud Pêtre en Belgique sur les enfants d'une école primaire. Cette étude a pour but de savoir si les enfants distinguent bien la publicité du contenu du site support, mais aussi de mesurer l'impact de différentes variables dans la capacité de discrimination telles que l'âge, la pratique de host-selling ou pas, le sexe, le milieu social, le niveau scolaire, son expertise dans le média Internet et la présence dans la famille de grands frères ou de grandes soeurs.
Bien que le groupe de 80 enfants ne soit pas exactement représentatif de la totalité de la population, les résultats sont très intéressants :
- à 7 ans, 20% des enfants sont conscients de voir une publicité, et le chiffre baisse à 15% en cas de host-selling.
- à 11 ans, 60% des enfants discriminent bien, mais seulement 20% en cas de host-selling.
On observe donc que la capacité à distinguer la publicité de son contenu sur Internet se situe entre 7 et 10 ans. Cependant, la confusion est accrue si la publicité ressemble volontairement au contenu (host-selling).
Quant aux autres variables, il s'avère qu'il n'y a pas de relation significative entre le sexe et la capacité de dicrimination, de même pour le niveau scolaire, la présence d'aînés dans la famille ou l'expertise dans le média Internet (X² de contingence). En revanche, le niveau d'étude des parents est un facteur important : les enfants dont les parents ont fait des études supérieures distinguent mieux la publicté que les autres enfants.
Cette étude révèle le pouvoir médiatique des publicitaires face à l'innocence des enfants, qui sont plus que jamais confrontés à la publicité. De plus le host-selling se caractérise bien comme une arme très efficace pour tromper l'enfant et faire baisser sa vigilance. Faut-il pour autant interdire le host-selling? Faut-il rendre obligatoires les séparateurs contenu/publicité? Autant de questions qui restent ouvertes...
Pour télécharger l'intégralité de l'étude c'est ici.